jeudi 22 avril 2010

Les infoutus 4 - D'un éléphant troué à la crédibilité du petit chaperon rouge

Didier de Lannoy
alias Vié ba Diamba, alias Matiti ya Pamba
Fej et Dijo
ou
les Infoutus de la vie

croquis, crayons ou pochades qui procèdent tous de la même « approche » que les dépêches AnaCo et les chroniques Huppé cul : des histoires brèves (lisibles sur écran, qu’on zappe ou qu’on imprime, qu’on classe ou qu’on supprime) ; des histoires qui s’intègrent dans un ensemble plus vaste (à charpente plus ou moins souple, à sauce plus ou moins gluante), comme des pièces d’un puzzle, à travers un dénominateur commun, des personnages récurrents et parfois même une trame (souvent obscure) ; des textes diffusés immédiatement après avoir été écrits, « just in time », par e-mail (à la merci des FAI : Un nouveau groupe armé ? Meuuunon, des fournisseurs d’accès internet !)...
2008-2009
Recueil
- On solde et on ferme !
d'extraits déjà diffusés par e-mail

Fej ? Qui n'est-il pas ? Cliquez sur:
Dijo ? Qu'est-ce qu'elle n'aime pas ? Cliquez sur :

http://jodi-book.over-blog.com/article-jodi-toute-la-nuit-chapitre-cinq-54183619.html




Un éléphant aussi peut avoir des trous dans le fromage


Un éléphant d’Amérique, contrôlé positif à la cocaïne à l’issue de la Flèche brabançonne ou de la kermesse cycliste d’Izegem, a été surpris en train de renifler

- Cela me rappelle quelqu’un… mais je ne sais plus trop qui… ni où… quelqu’un de la famille sans doute… un arrière-grand-père maternel peut-être… ?

les touches blanches du piano du cabaret-dancing ou

le râtelier d’un morse carnivore commis à la sécurité de la piscine-sauna ou

- Un vieil oncle infoutu peut-être… venu de très loin sans doute… de Carthage ou d’un pays d’Asie bordant la Mer d’Oman…?

les défenses d’une mère phacochère préposée au roulage et à l’entretien des stewardesses et des travailleuses sociales, dans un hôtel-casino-bordel rose de Phoenix en Arizona.


L’arsenic


L’arsenic, les hosties consacrées dont la date de péremption est expirée depuis plus d’une semaine, les champignons vénéneux travestis en nains de carnaval et les relations sexuelles sans préservatif, ça ne doit pas être si mauvais que ça sinon

- Pour en mourir après, il faut d’abord en avoir consommé, non ?

les infoutus n’en mourraient pas.


La joyeuse entrée du Pape charmant


On repeint les façades et les murs d’enceinte.

On bombarde au napalm et on assainit par le feu les bidonvilles qui jouxtent les beaux quartiers et les grands boulevards.

On dissimule les cahutes et les baraques ayant survécu au massacre derrière des palissades de bois ou un rideau de chasubles ou de filets de camouflage de l’armée.

On démantèle et on rase au bulldozer les kiosques, les terrasses et les restaurants de rue, les baraques à frites, les salons de coiffure et les échoppes de quados adossés aux murs des parcelles et les ligablos (aspirines, oeufs durs, savon de lessive, pétrole et boîtes de sardines) qui empiètent sur les trottoirs.

On expulse les indésirables, on arrête les syndicalistes, on déporte, on regroupe et on fixe dans des camps de tentes trouées, gardés par les forces de sécurité, tous les infoutus de la ville: les cireurs de chaussures et cordonniers en mapapas, les paumés, les sidatiques sans médicaments, les maladroits (qui se prennent les pieds dans un tapis-brosse à l’entrée du cabinet de travail d’une toiletteuse pour vieux matous solitaires), les moqueurs, les travestis, les enfants-soldats retournés à la vie civile, les communistes retraités, les conducteurs de taxis-motos, les suicidaires, les orphelins de Lumumba, les slameurs, les réparateurs de radios et de télévisions, les impudiques (qui invitent les maladroits à se déchausser et à déposer leur chapeau sur le lit), les rêveurs, les dissidents, les rappeurs, les veuves de guerre, les pousse-pousseurs, les ivrognes, les avorteuses, les insolents, les dingues, les laïcs, les violées, les blogueurs, les islamistes non pratiquants, les tagueurs, les tibétains, les épileptiques et les organistes de barbarie…

On enferme les vieillards dans des mouroirs obscurs.

On érige

- Vivent les contes de fée ! Vivent Disney World et le Vatican ! Vive le Prince charmant !

un arc de triomphe. On réquisitionne les plus jolies élèves des classes terminales du Sacré-Cœur, bien culées, dont les habits ne sentent ni la cigarette roulée à la main, ni le poisson frais du fleuve ou de la mer, et on les plante

- Vive le Pape ! Vive le Pape !

au bord de la grand-route, agitant des drapelets et jetant des pétales de flamboyants.


Faisceaux


à Monik Dierckx qui n'est pas une femme de grande vertu mais dont les sarcasmes me

- Nous !

manquent (qu’elle s’énerve, quoi ! ça va la réveiller, non ?)


Un vétéran se regarde dans un miroir de poche et se rase le menton (avant de recevoir une balle dans la tête), un conquérant fait la sieste (avant d’être blessé par une grenade ou un éclat d’obus), un mercenaire et un légionnaire jouent aux cartes et échangent des photos de femmes

- Des femmes habillées, exemplaires, vénérées ! Des saintes !

de grande vertu : Margaret Thatcher, la reine Fabiola, Hillary Clinton, Mama Yemo, Bernadette Soubirous, Benazir Buttho, Jackie Kennedy, Monik Dierckx, Jiang Qing, Diane Fossey, Soeur Emmanuelle, Anne-Marie Lizin, Jeanne d'Arc, Tzipi Livni, Lady Diana, Ingrid Betancourt ou Jade Goody (avant de sodomiser un infoutu avec un crucifix ou une baïonnette), un troupier de l'infanterie de marine écrit une très longue lettre à ses parents ou à sa fiancée (avant d'exécuter un combattant ennemi qui refuse de se repentir et de trahir les siens).


Crimes de merde


Dans quel pays conquis et à l’abri de quelle justice, des soldats de l’armée la plus morale

- Mais sans pitié pour l’ennemi cruel !

du monde se permettent-ils de déféquer sur les meubles

- Le canapé du salon, le lit des parents, la caisse du chat, le plan de travail de la cuisine, le coffre à jouets des petits et même le violoncelle de la fille aînée ?

et

- Avec infiniment plus de pudeur et de retenue ? En prenant soin de bien refermer la porte et de s’isoler ?

dans les armoires des maisons dont ils ont forcé l’accès et chassé les infoutus ?


Fej et Dijo

Tu meurs, infoutu ?

Tu ne vas quand même pas

- Alors qu’avec le GPS, la surveillance satellitaire et l’ADN, on ne pouvait plus se perdre !

me faire ça, excrément de spermatozoïde !


Problèmes de délestage et accès à un nouvel emploi


Dijo se renseigne.

On lui dit de ne pas s’en faire et on

- Ça ne sert à rien de veiller tout la nuit sur votre mari défunt, il ne va quand même pas s’enfuir ! Et personne ne va vous le voler !

la rassure. On porte à sa connaissance que, tout à côté de la morgue à pétrole, se trouve

- Equipée d’un groupe électrogène et d’un four à micro-ondes !

une salle de résurrection pour les chômeurs, les retraités et tous les autres infoutus.


C’est seulement pour un casting ?


Un infoutu portier observe un couple

- L’animateur-vedette d’une émission de téléréalité et une partition de Mozart encore inédite, allègre et cruelle !

qui rentre dans son hôtel de rendez-vous… et se prend à rêver : sans doute court-elle les castings

- A la recherche du grand amour !

dans les restaurants, les bars et les soirées dansantes et doit-elle, parfois, tourner des bouts d’essai ou accomplir de petits boulots, de 5 à 7, pour garder la forme et terminer le mois ?


La croix


Un infoutu est monté sur la croix tout seul, sans l’aide

- Ce n’est pas toujours facile, un vendredi, le soir, de trouver un tueur, au noir et libre-penseur alors que les bureaux sont fermés et qu’ils ne rouvriront pas avant lundi !

d’aucun chrétien, en se servant d’une échelle

- Comme un pendu ordinaire !

ou d’un simple escabeau.


Fej et Dijo

Fej et Dijo, un infoutu et une infoutue dont le couple se délite après la mort de

- Ce n’est pas un rat, c’est un octodon !

Cannabis ?


L’orfraie et le renard


à Willy Wolsztajn et Laurent d’Ursel


On fustige l’orfraie

- Malpolie ! Acérée ! Grinçante ! Une infoutue, quoi !

dont les cris dérangent et on laisse le renard

- Habile ! Elégant ! Sachant parler aux dames, aux seigneurs et aux corbeaux !

opérer.


Dieu est partout. Sous les formes les plus diverses. Il ne faut jamais cesser de le combattre


Un infoutu joue des coudes, brandit son micro et tente d'interviewer le grand mufti des catholiques sur différents sujets d’actualité :

- Le port d’un préservatif vertueux ne devrait-il pas être imposé aux vieux prêtres violeurs (qui pourraient s'être laissés séduire par de sales petites vicieuses, d’au moins neuf ans, venues se vanter, en confession, d’avoir commis des péchés au-dessus de leur âge et auxquels elles n'avaient pas droit) et aux jeunes beaux-pères inexpérimentés (qui pourraient avoir succombé aux charmes de fillettes perverses du même âge, jalouses de leur maman, dont ils auraient été amenés à défoncer l’anus et le vagin) de façon à leur éviter quelques petits ennuis aves la Commune ?

- …

- Si le dogme ne le permettait pas, l’Eglise ne devrait-elle pas accorder l’asile politique à tous ces violeurs-martyrs qui, après avoir courageusement refusé le port du caoutchouc pour demeurer fidèles au dogme, se seraient ainsi retrouvés dans un très grand embarras ?

- …

Le Saint-Père (ayant glissé sur une merde et

- Ça va sinon ?

- …

souillé sa soutane et devant faire face à une importante vague d’émotion) n'a pas souhaité réagir.


Les sangliers


Les gardes champêtres et les agents forestiers ont réussi à piéger un groupe de sangliers infoutus

- Démunis de titres de séjour, ces salopards !

qui se nourrissaient clandestinement dans un champ de betteraves ou de patates destinées à la production de sucre de Tirlemont, de sirop de Liège, de frites bruxelloises bilingues ou de pommes de terre à la flamande. Ils les ont enfermés dans un enclos et les ont

- Obligé ! Ils auraient été capables de revenir, ces salopards !

massacrés sur place et

- Les sangliers sont des animaux impurs ! Ils mangent n’importe quoi et tout leur est permis : les neveux montent les tantes et les grands-pères déflorent les petites-filles ! Ces salopards vivent tous ensemble dans une seule pièce, chient sous eux et négligent de se frotter le cul après avoir déféqué ! Ils sont vecteurs de maladies très dangereuses !

ont transpor-

té et

- Que cela serve de leçon aux autres salopards ! Qu’ils sachent ce qui les attend ici !

abandon-

né leurs corps criblés de balles en bordure du bois de Nassogne dont la faim les avait chassés.


Les valises


Alors que

- Et après aussi !

les disques durs n’existaient pas, Jej a passé beaucoup d’années, de mois, de semaines, de jours et d’heures de plusieurs de ses vies à consigner (sur des fiches ou des carnets, dans des cahiers, des journaux ou même des testaments) et à entreposer (dans des chemises, des classeurs, des enveloppes, des tiroirs, des caisses ou des paniers) ou à dissimuler (sous l’oreiller, au-dessus d’une armoire ou d’un lit, au fond d’une malle ou derrière un rideau) des textes ou des documents, des armes et des déguisements, qui n’intéressaient personne d’autre que lui et dont il

- Ni aucun autre infoutu !

n’avait pas vraiment l’utilité et dont il

- Ni aucun autre infoutu !

ne se servira probablement jamais...

A présent, Fej se rend bien compte qu’il est grand temps de (commencer par demander à Dijo de bien vouloir lui acheter

- A Aldi ou chez Delhaize ! Si ça ne te dérange pas trop ! Si tu y penses ! Quand tu auras le temps !

des rouleaux de sacs jaunes, des sacs « pour papiers et cartons ») faire lui-même toutes ses valises en veillant à ce qu’aucune d’elles ne pèse plus de vingt-cinq kilos et d’inviter ses costauds

- Avant le passage des camions-poubelle ! Si ça ne vous dérange pas trop ! Si vous y pensez ! Quand vous aurez le temps !

à les déposer sur le trottoir.


Le jackpot


Quand leur infoutue fille a été écrasée (les jambes et le bassin) par le chauffeur de la voiture d’un membre de la famille royale ou mordue à pleines dents (les oreilles, le nez, les lèvres, les joues, les seins, les fesses) par un berger allemand des services spéciaux de la police fédérale, des parents criseurs ont cru

- Nous voilà sauvés ! Loué soit le Seigneur ! C’est le bout du tunnel ! On a gagné !

avoir touché le gros lot et être tirés d’affaire.


Fej et Dijo

L’infoutue mite de la chambre à coucher, chaque matin Dijo la tue et chaque soir Fej la ressuscite.


Louis, le tout dernier petit seizième


Ainsi donc Louis XVI serait-il cet infoutu roi de France qui aurait perdu les élections en 1789 ?


Marie, la toute dernière petite nouvelle


Elle avait à peine treize ans quand elle a débarqué dans le quartier avec deux mignonnes (dont une était déjà pleine) souris blanches enfermées à l’intérieur d’une vieille boîte à chaussures percée de plusieurs trous pour la respiration.

Marie avait treize ans à peine. Son protecteur l’avait achetée à un très bon prix et elle avait hâte de prouver

- Je me suis bien préparée !

à son homme qu’elle était un bon achat...

Il a quand même fallu tout lui apprendre, y compris à courir pour échapper aux flics, aux avocats, aux curés, aux infirmiers, aux psychologues et aux assistantes sociales. Mais elle avait une grande marge de progression et développait des qualités athlétiques impressionnantes. Son jeu de cul était énorme mais, comme le disait son protecteur

- J’espère bien pouvoir la revendre alors au propriétaire d’une grande chaîne ! Pour au moins vingt mille euros !

tant qu’elle n’aura pas deux saisons de trottoir dans les jambes, Marie ne sera pas encore une vraie tapineuse.


Décharges


Pas même vingt-cinq ans et déjà infoutus.

Ils ont martelé, martelé, martelé, martelé, martelé les portes et cogné, cogne, cogné, cogné, cogné les murs avec leurs poings et se sont retrouvés pendus à une poutre métallique, à un radiateur, à l’embrasure ou aux barreaux d’une fenêtre.

Ils ont mordu les portes et lacéré les murs de leur cellule et se sont retrouvés pendus avec un câble électrique, l’élastique de pantalons de jogging ou des draps découpés en lanières.

Ou à l’aide de ceintures de peignoir…

Ils ont été enterrés le jour même dans une fosse commune.

A cet effet, deux fourgons cellulaires blindés, peints en noir, conduits et surveillés par des croque-morts armés, sont venus embarquer les corps.

En face, de l’autre côté de la rue, des parents et des amis attendaient sur le trottoir, dans le froid, en silence… tandis qu’un vieil homme, ayant depuis longtemps quitté un domicile familial, une maison de repos et de soins ou un centre psychiatrique

- On ne m’interrompt pas !

était très occupé à fouiller une benne d’ordures et ne voulait pas être dérangé.


A la claire fontaine


Comment un infoutu puceau peut-il

- Tu fais semblant de bien l’aimer ! Et tu lui parles bien et tu l’embrasses bien et tu la caresses bien ! Et tu l’amènes à ouvrir largement les oreilles, la bouche et les cuisses ! Et tu t’introduis profondément à l’intérieur de son corps ! Et tu lui arraches les tympans, l’hymen et la luette ! Brusquement, d’un seul coup, sans prévenir !

- En dan ?

- Ben alors, l’eau s’engouffre ! Elle se noie !

éviter de se casser cruellement le pénis et résister victorieusement aux charges héroïques et aux chevauchées fantastiques

- Avec finition à la main !

d’une vierge infoutue dont il aurait imprudemment sollicité des services ?


Mon bébé sous le bras


Je portais mon bébé sous le bras. Un paquet ou un ballon de base-ball, une poupée russe. Sans membres inférieurs ni supérieurs. Emballé avec des feuilles, comme une kwanga.

Un vieux papa s’est approché. Et, sans rien dire et sans rien demander, sans même sourire à l’enfant ou lui caresser la joue, les fesses ou les cheveux, le vieux a embrassé mon bébé sur la bouche.

Mon bébé sous le bras a aussitôt fait la grimace comme si on lui avait fait goûter ou avaler quelque chose de rance ou d’amer. Puis il s’est mis à tousser, tousser, tousser. J’ai pris un mouchoir et lui ai frotté les lèvres. Je les ai frottées, frottées, frottées. J’ai vu alors apparaître, dans la bouche de mon bébé, un bout de langue verte qui, peu à peu, s’allongeait, s’allongeait, s’allongeait. Et qui grossissait, grossissait, grossissait. J’ai réussi à prendre ce bout de langue dans mes doigts et j’ai tiré, tiré, tiré dessus. Et ce bout de queue est devenu la queue

- D’un lézard ?

d’un énorme crapaud. J’ai fait sortir le monstre de la bouche de mon

- Il était temps ! Déjà, il commençait à s’étouffer !

bébé. Je l’ai saisi et je l’ai jeté, jeté, jeté. Et j’ai poursuivi, poursuivi, poursuivi le monstre. Le crapaud à queue verte courait en bougonnant et en boitant. Il a réussi à se faufiler sous une armoire puis à se glisser dans un autre trou et je l’ai

- Tenant toujours mon bébé sous le bras !

poursuivi, poursuivi, poursuivi et je l’ai tisonné, tisonné, tisonné. Le crapaud à queue verte s’est enfui en criant et en claudicant et je l’ai poursuivi et je l’ai rattrapé et je l’ai tisonné, tisonné, tisonné. Et le crapaud à queue verte s’est transformé et est devenu deux petits moineaux misérables et terrorisés, puis trois, puis quatre. Et je les ai

- Tenant toujours mon bébé sous le bras !

ai tisonnés, tisonnés, tisonnés. Et les moineaux sont devenus des millions et des millions et des millions de fourmis purulentes et agressives et…

Et je me suis alors précipité dans mon bureau et je me suis

- Pour m’en débarrasser !

empressé d’écrire ce mauvais conte sur un morceau de papier.

Le lendemain quand j’ai voulu le relire, il s’était enfui, il avait disparu sans laisser aucun trace sur la feuille où je l’avais noté.


Dans le brouillard


Un infoutu marchait dans un épais brouillard, les bras tendus vers l’avant. On ne voyait même plus

- Ni, bien sûr, les flingues et le crucifix qu’il tenait à bout de bras !

ses mains.

On en a retrouvé une, quelques jours après

- Bénie ?

flottant à la surface d’un bénitier

- Noyée ?

écrasée

questionnée

sectionnée...


Fej et Dijo

Fej n’a jamais organisé une vente de charité au profit d’une ligue de vertu ?

Ni lancé un chat et deux grenouilles bien cuisseuses à la tête d’un réparateur de lave-linge ?

Les bras et les jambes rongés par des puces de trottoir ou d’escalier, Fej paraissait porter des traces

- Il avait, disait-il, été poignardé dans sa jeunesse par un touriste allemand !

de pinces de homard autour du cou. Le teint pâle et les yeux cernés, où qu’il aille, il se trouvait peu de monde pour lui serrer la main. Bref, Fej e n’était pas un personnage très

- Dès qu’il éternuait ou qu’il tirait la chasse, la maison explosait ou menaçait de s’écrouler !

rassurant ?

Et pourtant, c’est Fej

- C’est bien lui !

que Dijo

- C’est celui-là que je prends ! Il bouge bien les oreilles !

a choisi ?

Dijo a-t-elle abandonné son vélo sous un arbre déraciné par la tempête à San Sebastian, à l’entrée d’un wagon abandonné dans un cimetière de train à Jemelle ou, en Hollande, dans un champ

- De tulipes ?

d’infoutues carottes ou sur les trottoirs de la Leopoldauerstrasse, à Florisdorf, dans la banlieue de Vienne ?

Dijo a-t-elle abandonné son vélo et

- Alors même que les gens disaient de lui qu’il s’était déjà promené partout ! Et qu’il fréquentait des toilettes sur lesquelles tout le monde s’était déjà assis !

accepté de monter dans le taxi de Fej ? Ou a-t-elle été emportée par les vagues alors qu’elle se promenait, nue, sur une plage ?

Fej et Dijo sont-ils devenus alors un couple d’infoutus à la mode et très demandé ? Leurs différentes façons

- Nous ne fonctionnons pas au diesel ! On prend vite feu ! Il ne nous faut pas trop de temps pour démarrer !

de se chauffer, de s’aimer et de s’engueuler en plein air ont-elles été appréciées par les promeneurs du Bois de la Cambre ou du Parc de la Révolution ? Auraient-ils été invités à se produire en public ou dans des soirées privées ?

Auraient-ils cependant, ces dernières années, été sifflés copieusement durant les dernières minutes de certaines parties sans

- Sans même qu’il ait fait preuve d’un bel élan de pénétration ? Sans qu’elle ait réussi à lui enfermer les couilles dans un sac-poubelle rempli de petites souris malicieuses ou de ratelets affamés

inspiration pour

- Sans même une attaque digne de ce nom ! Sur de simples phases arrêtées !

n’avoir marqué qu’un seul but en deux mi-temps de quarante-cinq minutes ?

Pour la défense de Fej et de Dijo, le porte-parole du couple devrait-il faire valoir qu’ils sont atteints, l’un ou l’autre

- Ils partagent le même lit mais pas les mêmes rêves, ni les mêmes cauchemars !

de cancers invalidants pouvant avoir pour effet de diminuer la libido ? Et que, de toute manière, pour juguler la crise, ils allaient devoir

- Et ils se disaient bien décidés à le faire !

tout rationner : la margarine, la pâtes dentifrice, le tabac, les relations sexuelles, la bière et le papier cul ?

Fej, si on lui annonce

- Tu sais quoi ? Tu connais la nouvelle ?

la mort de Dijo, qu’est-ce qu’il va bien pouvoir faire : fermer à clef la porte de leur chambre, se mettre au lit, débrancher le téléphone ? ...


Ce n’est pas parce que le Petit chaperon rouge n’est plus crédible qu’il faut cesser d’en parler


A Monik Dierckx qui ne croit même plus en Dieu, oh !


Joseph prend le révolver qu’il avait caché sous les coussins du canapé et tire deux coups de feu. Presque à bout portant. Sur son gamin. La première balle se fiche dans le coeur de l’infoutu et la seconde se loge dans son œil gauche, un oeil vitreux qui donne au gamin un regard de pirate.

Ces derniers temps, le gamin Jésus

- Recherché par la police ! On avait retrouvé des empreintes de « djeuns » sur un bol de cigüe ! Un pédophile clochard grec aurait été assassiné aux alentours de la gare du Midi !

se montrait de plus en plus violent à l’égard de son entourage. Ce soir-là il avait débarqué chez papa et de maman avec toute sa bande de pervers et de drogués, une douzaine de branleurs de foire, cagoulés comme des flics et armés de chaînes de bicyclette et de battes de base-ball.

Il s’en était pris violemment à sa mère qui gisait béatement allongée sur sa paillasse comme une reine-truie s’apprêtant à accoucher d’une nouvelle portée de princes-porcelets. Il lui avait porté

- Il n’y a pas d’autres fils (ou de filles) de Dieu que moi ! Que moi ! Que moi ! Que moi !

des coups, des coups, des coups…

Gonflements, gargouillis, expulsion de foetus et de matières infoutues par les voies naturelles…